GLINT | NOV20

Le président directeur général de la société The Style Gate basée à Milan, Alessandro Maria Ferreri, nous dresse un bilan sur l’état de santé actuel du luxe en italie et nous parle de ses projets futurs. avec un sens inné du style, cet ingénieur, formé à l’école polytechnique de turin, a plus de 20 ans d’expérience de management dans de grands groupes industriels, et est considéré aujourd’hui comme l’un des plus influents managers de l’année par le magazine forbes.

Karine Patricola – Pouvez-vous nous dire comment se porte le secteur du luxe actuellement ?
Alessandro Maria Ferreri – De nombreuses entreprises affiliées au domaine du luxe sont malheureusement touchées depuis cette pandémie. Les répercussions se ressentent également sur la filière de production des marques, des artisans, des sociétés et des fournisseurs. En tant que consommateurs, nous percevons simplement la partie finale de la vente, que ce soit dans l’online ou en boutique. Un grand nombre d’artisans risque de disparaître irrémédiablement. L’absorption du luxe est devenue complexe à cause d’une polarisation de la richesse. De grands groupes comme Chanel, Hermès, entre autres, résistent et constituent des valeurs sûres dans le monde du luxe, car il est clair que, dans ces moments confus et de totale indécision, on se réfugie plutôt sur des produits de grandes marques. Il est préférable de s’acheter un Birkin chez Hermes, plutôt que cinq sacs Stella McCartney ou Chloé, considérés comme des produits plus éphémères.
Certaines marques qui n’appartiennent pas aux grandes maisons de luxe souffrent énormément de cette conjoncture. Il suffi de voir l’univers Bridal, un secteur prospère jusqu’à présent, aujourd’hui complètement à l’arrêt. Déjà en pleine crise auparavant, la mode Homme a vu le secteur s’affaiblir encore davantage. Toute l’industrie de la chaussure subit également un fort impact négatif.
Les marques qui s’étaient organisées pour travailler avec des objectifs très ciblés et une stratégie à moyen-long terme réussiront à s’en sortir pendant que d’autres, en l’absence d’une base solide, risqueront de disparaître complètement. Il faut protéger la filière productive, aider les petits artisans en les faisant travailler davantage, car c’est bien grâce à eux que l’Italie est le premier producteur de luxe au monde. Les seules grandes marques italiennes Made in Italy qui résistent encore sont Prada, Armani, D&G ou encore Zegna, les autres marques appartiennent à de grands groupes étrangers qui fabriquent seulement en Italie.

KP – À l’ère du Covid-19, de quoi les entreprises ont-elles besoin pour « surfer » sur cette pandémie et durer dans le temps ? Faut-il changer de stratégie ?
AMF – En ce moment, pour résister, les entreprises doivent construire un vrai système de consortium et renoncer à travailler de façon individuelle. Je conseille souvent à mes clients de créer des systèmes transversaux. Ma grande initiative de cette année, intitulée “When Food meets fashion” avec la collaboration du magazine Forbes Italie et Marco Bonaldo à la tête de Galateo & Friends, est le premier pas d’une création de plans transversaux entre secteurs qui ne dialoguent habituellement pas entre eux. Le fait de créer des conjonctions entre le secteur de la mode et celui du secteur alimentaire fait que ces entreprises peuvent aujourd’hui surfer sur la vague, avec une certaine indépendance financière. Autrefois, en Italie, il était mal vu qu’un peintre puisse être aussi un sculpteur ou encore qu’un joueur de tennis devienne un joueur de golf. Encore aujourd’hui, il semble étrange de voir un styliste ouvrir un restaurant, ou une grande marque italienne comme Rovagnati, connue dans la grande distribution de charcuterie, s’acheter la marque très chic Pineider, représentant l’excellence des produits artisanaux italiens en matière de papier, de cuir et d’instruments d’écriture ! Aujourd’hui, être pionnier et précurseur en dehors de son propre secteur de compétence peut représenter la survie pour beaucoup de sociétés. On peut lier des plans transversaux entre 1 000 secteurs différents, par exemple entre la mode et le design ou entre la mode et l’interior design comme la griffe de luxe Elie Saab qui vient juste de signer une licence pour décoration d’intérieur. On pense notamment à Fendi Maison, Trussardi Maison et Etro Maison, qui travaillent conjointement avec le secteur de la mode depuis longtemps et avec succès. Créer une synergie entre secteurs parallèles ne représente pas une extension
de gamme, mais un grand dialogue entre les arts. Pensez au Groupe Bulgari, qui crée des bijoux et qui se dédie aussi magnifiquement et depuis déjà longtemps à l’hôtellerie, sans aucune canalisation entre ces deux mondes, au point que quand on parle de Bulgari, on pense aux bijoux aussi bien qu’à l’hôtellerie au même niveau de qualité, de chic et de raffinement.

KP – “The Style Gate” a-t-il une nouvelle vision du futur ?
AMF – Ma société The Style Gate a toujours eu une vision sur le futur, fondée sur un concept de conseils en management et stratégie, avec une aide concrète pour les sociétés. A la différence des grands noms du secteur tels que Bain, Deloitte Consulting Group ou encore Boston Consulting Group, qui opèrent avec d’énormes budgets, The Style Gate délivre des conseils pour aider les entrepreneurs à s’améliorer, avec une structure plus légère, d’autant plus flexible, ce qui permet d’adopter une politique d’aide sur mesure à nos clients, avec un rôle presque de “médecin” qui intervient en cas d’urgence. Mais une fois la prescription établie, je revêts mon rôle de directeur général, de façon à pouvoir aider l’entrepreneur à mettre en pratique mes conseils. Pour certains de mes clients, je deviens même administrateur temporaire le temps nécessaire. Il faut des compétences à 360°, qui vont de la communication à la logistique et au marketing. Mon rôle est de faire en sorte que tout puisse être à nouveau sain et fonctionnel, dans tous les domaines, dans l’entreprise qui fait appel à mes services.

KP – Avec Forbes Italia et votre partenaire Marco Bonaldo, vous avez organisé une table ronde sur l’alimentation et la mode. Voulez-vous nous en parler ?
AMF – Avec Marco Bonaldo, nous avons mené à terme depuis longtemps ce concept du bon dans le beau. Par contre, le concept du “Food and Fashion” (les aliments et la mode) est plus récent et donc notre volonté est de créer avec succès des bouteilles raffinées d’huile d’olive pour tous les hôtels Armani, Versace, Bulgari et les faire dessiner par Antonio Marras, Trisha Gulf, Jacqueline Morabito, Carla Sozzani et d’autres encore. Marco s’occupe de l’aspect productif et ma société The Style Gate crée des ponts entre ces mondes. Je maîtrise parfaitement l’univers de la mode et je peux donc me permettre de guider les marques dans le choix de nouvelles directions à prendre pour adopter justement de nouvelles synergies. Pour nous, tisser des liens entre l’univers alimentaire et celui de la mode ne veut pas dire opter pour des capsules temporaires, mais créer un vrai système d’action à moyen ou long terme. Travailler pour Armani, Versace, Bulgari ne signifie pas créer simplement une bouteille d’huile, mais aussi faire du vinaigre balsamique, des épices, des sels, pour la restauration, pour l’hôtel, pour la vente au détail. Notre concept ne s’arrête pas à un simple marketing publicitaire, nous cherchons plutôt à donner une stabilité à l’entreprise, pour une diversification d’investissements, dans une vision à moyen ou long terme.

KP – Pouvez-vous nous parler de vos projets pour le futur ?
AMF – Le fait de travailler sur des projets importants, d’avoir une certaine visibilité, fait que je suis constamment sollicité. On me demande souvent d’occuper des positions de directeur général dans de nombreuses sociétés, et en tant que visionnaire, j’ai pu démontrer que j’avais les capacités nécessaires pour mettre en œuvre mes stratégies.
Un des secteurs qui fonctionnent le mieux chez The Style Gate, en plus de la mode, est celui destiné à l’interior Design. Parmi mes clients principaux, je compte la famille royale de Liechtenstein, qui détient une société d’aménagement de magasins La Mattec, dont le siège est à Vérone et qui crée le design de toutes les boutiques, Gucci, Acqua di Parma, Bottega Veneta, Louboutin.
Mentionnée aussi quand on parle des hôtels Marriott, des hôtels Sheraton, la société Mattec est une société avec d’importants clients également dans le commerce de détail et résidences privées, qui a la possibilité d’opérer dans le monde entier. C’est un des nouveaux projets à long terme auquel je tiens beaucoup, car cette société est en phase de devenir leader dans le secteur ; elle détient une capacité productive extrêmement verticale, intégrée, et fait du 100 % made in Italy avec une grande maîtrise et une connaissance du travail du bois, du marbre, des métaux, du verre, un grand savoir-faire 100 % italien.

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